L'accès à l'eau potable

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Gabrielle Brassard, 2012

SÉCURISER L’APPROVISONNEMENT EN EAU POTABLE ET DOUCE DANS LE MONDE

Mise en contexte

Selon les données citées par Mileham (2010), « seulement 2,5 % des 1,4 milliard de km3 d'eau sur la Terre est propre à la consommation humaine, et la majeure partie de cette eau douce est inaccessible, puisqu'environ 70% se trouve dans les glaciers, la neige et la glace. Les 8 millions de km3 d'eaux souterraines constituent la plus importante source d'eau douce, et seulement 0,3% des ressources en eau douce (105.000 km3) se trouve dans les rivières, les ruisseaux et les lacs ». Cette ressource si rare est pourtant essentielle à la vie, à la production de nourriture et à la santé.

Or, selon le troisième rapport mondial des Nations Unies sur la mise en valeur des ressources en eau, déposé lors du cinquième Forum Mondial sur l’eau qui s’est déroulé en 2009 à Istanbul, en Turquie, les prévisions sont inquiétantes. Le rapport affirme : « (…) que, en 2050, 1,8 milliard d’êtres humains (sur 9,3) vivront dans des régions privées totalement d’eau et quelque cinq autres milliards dans des pays où il sera difficile de répondre à tous les besoins; le monde devra faire face à un déficit de 40 % entre la demande et les ressources disponibles en eau d’ici 2030 ». Quelques experts sont moins inquiets. C’est le cas de Frédéric Julien, du Laboratoire d’études et de recherches en sciences sociales sur l’eau (LERSS-eau) de l’Université Ottawa, pour qui les pénuries appréhendées en certains endroits sont « essentiellement de craintes liées aux usages agricoles et industriels de l’eau ». Il rappelle à ce propos que la notion de « besoins en eau » est relative : « Le cas d’Israël en atteste de manière éclatante : cet État pilote une économie riche et diversifiée avec des réserves d’eau douce qui passeraient pour largement insuffisantes au Canada et aux États-Unis, deux pays où les prélèvements hydriques par personne sont parmi les plus élevés au monde et largement supérieurs à la moyenne occidentale ».

La rareté anticipée de la ressource en eau s’explique par deux grands facteurs : la croissance prévue de la population mondiale, de ses besoins en eau et nourriture et donc de la consommation en eau, et la dégradation de l’environnement et en particulier le changement climatique d’origine humaine qui contribue à rendre précaire cette ressource essentielle à la vie.

En effet, depuis que la Terre se réchauffe, « le niveau moyen de la mer dans le monde a augmenté de 1,75 mm chaque année au cours de la seconde moitié du vingtième siècle et on assiste à une fonte généralisée des glaciers non polaires, ce qui réduit le débit des cours d'eau en saison sèche, et accroît les températures de la terre et de la mer » (Mileham 2010). Il s’ensuit des modifications importantes de l’écosystème : la superficie des terres classées par le GIEC comme très arides a plus que doublé depuis les années 1970, les inondations sont plus graves dans les altitudes moyennes-hautes, les sècheresses sont plus longues et plus fréquentes dans certaines régions de l'Asie et de l'Afrique, et les phénomènes El Niño sont plus fréquents et plus intenses.

Les experts sont unanimes; si la gestion et la consommation de l’eau ne changent pas dans la prochaine décennie, les tensions reliées à l’or bleu se multiplieront et seront source de nouveaux conflits, comme c’est déjà le cas dans certaines parties du monde. L’eau deviendra probablement « l’une des premières causes de tensions internationales (…) et le nombre de réfugiés environnementaux pourrait être multiplié par cinq d’ici 2050 » (Atlas du Monde Diplomatique : 2009). Pénuries, absence de politiques coordonnées, partage inégal entre pays frontaliers, contraintes économiques et environnementales, catastrophes naturelles; autant de facteurs qui font de la gestion de l’eau potable et douce l’un des enjeux les plus importants des prochaines années. John F. Kennedy d’ailleurs dit un jour : « Anyone who can solve the problem of water will be worthy of two Nobel prizes – one for peace and one for science ».

Des rencontres internationales, des penseurs, des politiques, des rapports : les initiatives ne manquent pas pour tenter de rendre plus harmonieuse la gestion de l’eau dans le monde en contexte d’incertitude climatique. Toutefois, en raison d’enjeux économiques et politiques complexes, il semble difficile, voire impossible de légiférer ou de coordonner les politiques officielles concernant le précieux liquide. Pourtant, si des lois claires et des ententes ne sont pas bientôt établies, les pénuries d’eau ou les inondations pourront entrainer des guerres, aussi graves et meurtrières que celles engendrées par d’autres ressources naturelles, comme le pétrole, un peu partout sur la planète, et dans un avenir relativement proche.

Le droit à l'eau et à l'assainissement est déjà voté à l'ONU. Le Canada et les États-Unis se sont abstenus.

Des pistes de solutions existent, mais les enjeux de l’eau se situent à plusieurs niveaux, et il semble ardu de trouver un consensus, sinon celui que l’eau est essentielle à tout et tous.

Exemples

Les bassins transfrontaliers - l'exemple de la Turquie, de la Syrie et de l'Irak

La gestion de l’eau et son accès sont déjà une source réelle de tensions dans certains endroits du monde. C’est notamment le cas de la Turquie, de la Syrie et de l’Irak. L’article du Monde décrit la situation : « (…) la surexploitation de nappes d’eau par la Turquie à la frontière turco-syrienne a abouti au tarissement de sources en Syrie » (Dupont : 2010). La chercheuse au Centre d’études et de recherches internationales et professeur à l’Institut des hautes études internationales à Genève, Marwa Daoudy, a consacré plusieurs articles et un ouvrage à ce conflit précis qui implique ces trois pays. Dans son livre Le partage des eaux entre la Syrie, l’Irak et la Turquie. Négociation, sécurité et asymétrie des pouvoirs, l’auteure explique que même si les conflits armés de ces régions ont été plutôt orientés autour du pétrole, l’eau est de plus en plus un sujet de tensions. En effet, les grands projets hydrauliques de la Turquie se font au détriment de l’approvisionnement en eau de la Syrie, déjà aux prises avec des problèmes de pollution des eaux souterraines (Hassan-Yari : 2005). La gestion des cours d’eau transfrontaliers de la région (le Tigre, l’Euphrate, la vallée du Nil, le bassin du Jourdain et le lac de Tibériade) est source de discorde. Ces pays sont déjà en guerre à cause de divers aspects (territoires, ressources, religion), mais l’eau fait partie des sources de tensions et de la complexité des relations syrio-tuques-irakiennes.

La gestion de l'eau quand la répartition est inégale: l'exemple d'Israël

Dans la région d’Israël aussi, l’eau est source de conflits. Plusieurs régions du Proche-Orient souffrent de ce que les experts appellent un « stress hydrique », c’est-à-dire un déséquilibre entre les ressources disponibles en eau et la consommation de cette dernière qui va en augmentant avec la croissance démographique. Là encore, l’eau n’est pas la source première du conflit israélo-palestinien, mais elle a un « caractère géopolitique évident dans les relations entre Israël et les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza, où les tensions prennent leur origine dans une disparité flagrante de consommation entre ces deux communautés qui partagent les mêmes sources d’approvisionnement en eau », d’après une analyse du site internet Ressources pour la Paix. L’État d’Israël exploite une grande partie des eaux souterraines qui s’écoulent sur son territoire et qui proviennent de la Cisjordanie. Les nappes phréatiques sont surexploitées, et mènent à un épuisement des réserves d’eau. Elles sont majoritairement exploitées par Israël, ce qui laisse la Palestine en situation de pénurie d’eau. Toujours selon l’étude, une véritable « hydrostratégie » serait mise en place par Israël pour garder le contrôle des eaux.

L'impact des changements climatiques sur la ressource en eau

Les changements climatiques, et en particulier les inondations ou sècheresses imprévues, augmentent l’instabilité et l’incertitude de la gestion de l’eau potable et douce dans de nombreuses régions du monde, ce qui fragilise la gestion des réseaux de distribution d’eau. En Inde, par exemple, la fréquence et la force des épisodes de pluie augmentent même si le nombre de jours pluvieux diminue, ce qui augmente la probabilité de fortes inondations et rend incertain la date du début de la mousson. Comment maintenir des services adéquats de distribution d’eau dans des conditions climatiques de plus en plus incertaines ?

Les ressources en eau étant cruciales pour la production alimentaire, l'agriculture est l’un des secteurs les plus durement touchés par l'insécurité de l'eau due aux changements climatiques, selon ce que rapporte Mileham (2010) : « En Afrique et en Asie, 85 à 90 pour cent de l'eau douce est affectée aux activités agricoles. Un approvisionnement en eau plus instable dans ces régions endommagerait les cultures, dégraderait les terres et réduirait la production alimentaire, aggravant la malnutrition et la famine ». Or, selon Vahid Alavian, conseiller en eau à la Banque mondiale, « de nombreux pays continuent d’accélérer leur production alimentaire, principalement en développant les cultures irriguées, pour vendre leurs produits à des prix élevés, sans se préoccuper de la diminution des ressources en eau. Si cette pratique continue, l’eau va bientôt manquer et causera une diminution de la production alimentaire, qui constitue dans certains pays une ressource essentielle pour l’ensemble de la population. Ce sont les pauvres qui en ressentiront le plus les effets ».

L’impact des changements climatiques sur la quantité d’eau dans une région est aussi une question de santé publique. En effet, une baisse de la ressource en eau peut nuire à l’hygiène quotidienne. Inversement, si les précipitations et l’humidité augmentent, les maladies infectieuses peuvent se développer davantage. Ainsi, « après le passage de l'ouragan Mitch en 1998, les inondations au Nicaragua ont été à l'origine d'une multiplication par six de l'incidence du choléra. Dans certaines régions tropicales, les cyclones et les inondations créent des terrains propices pour les moustiques vecteurs du paludisme et de la fièvre de la dengue » (Mileham 2010).

Points de vue

Plusieurs intellectuels militent depuis plusieurs années à faire de l’eau « un bien commun ». Le Manifeste de l’eau, publié par Riccardo Petrella en 1998, propose d’instaurer un « Contrat mondial de l’eau [qui] se fonde sur la reconnaissance de l’eau en tant que bien vital, patrimonial, commun mondial ». Ce contrat est basé sur deux finalités principales :

  • « l’accès de base à l’eau pour tout être humain, toute communauté humaine», ce qui implique notamment « la définition et l’approbation d’une loi-convention mondiale de l’eau qui intègrerait dans la Déclaration universelle des droits de l’homme le droit politique économique et social, individuel et collectif de l’accès à l’eau »;
  • « la modification des lois nationales constitutionnelles ou spécifiques à l’eau, ou l’approbation d’une nouvelle loi relative à l’eau ». Cette deuxième finalité concerne la gestion solidaire et durable intégrée de l’eau, qui comporte un double devoir, individuel et collectif, dans l’utilisation et la conservation/promotion de l’eau.

L’ONG indienne South Asia Network on Dams, Rivers and People (SANDRP) recommande d’ailleurs que soit instauré un « Right to Water Act : « The human rights perspective is that clean water should be ensured for drinking and domestic use as a right to all people without any discrimination. ».

Le Manifeste identifiait en 1998 trois enjeux majeurs qui sont encore et resteront longtemps d’actualité :

  • le non-accès à l’eau potable pour 1,4 milliard de personnes (du point de vue de la quantité) et plus de 2 milliards de personnes (du point de vue de la qualité/potabilité)
  • la destruction et la détérioration de la qualité de l’eau et des réservoirs naturels par où elle transite en tant que ressources fondamentales de l’écosystème Terre et de la vie humaine
  • l’absence de règles mondiales et de sujets porteurs d’une « politique de l’eau » mondiale et solidaire au moment où les faiblesses et les carences structurelles de la part des communautés locales (communes, États) en matière de maîtrise et de contrôle de l’eau deviennent de plus de plus évidentes (Petrella, 1998).

Axes de réflexion

À ce jour, il n’existe aucun texte de loi pour faire de l’accès à l’eau un droit humain. Le 1er novembre 2008, les Nations Unies ont créé un poste d’expert indépendant au sein du Conseil des droits de l’homme dans l’objectif de faire inscrire l’accès à l’eau potable et à l’assainissement des eaux dans les droits humains. Catarina de Albuquerque, l’avocate portugaise mandatée pour cette mission, espère « obliger les États à se préoccuper de ces questions ».

Si l’eau est un « bien commun » qui « nécessite donc une responsabilité collective [qui] doit s’étendre à tous les aspects concernant l’eau : de la sauvegarde et de sa durabilité à sa distribution et à son assainissement» (dans Vallée, Le Devoir, 2010), elle est aussi une source d’énergie (par le biais de l’hydroélectricité, par exemple) et a des usages industriels importants, par exemple pour l’extraction des sables bitumineux ou la fracturation hydraulique utilisée pour exploiter les gaz de schiste. Les défenseurs d’une politique internationale de l’eau refusent qu’elle devienne une marchandise, puisqu’elle appartient à tout le monde. Toutefois, « le secteur privé occupe une place de plus en plus importante dans la gestion de l’eau » et « on assiste à une marchandisation de l’eau, d’une part, à un abandon de l’eau dite naturelle » (Petrella). Elle est en effet consommée plutôt qu’utilisée. On s’en sert pour produire de l’électricité, pour alimenter les résidences, on la met en bouteille, on la traite, on la dessale. Bref, elle est un produit plus qu’un bien commun puisque, à l’instar de nombreuses sources d’énergie, elle est soumise à la loi du marché n’étant pas protégée par des lois ou des ententes internationales.

Pistes de solution

La gestion intégrée des ressources en eau (GIRE)

La ressource en eau est au cœur de nombreux usages humains. Au delà des besoins domestiques, l’eau est nécessaire à l’agriculture, à l’industrie, au tourisme, à la pêche, à l’énergie, etc. La notion de Gestion Intégrée de la Resource en Eau (GIRE), très encouragée par le forum mondial de l’eau, propose un modèle de gestion qui valorise la coordination entre tous ces usages : « la GIRE est un processus qui encourage la mise en valeur et la gestion coordonnée de l’eau, des terres et des ressources associées en vue de maximiser le bien-être économique et social qui en résulte d’une manière équitable, sans compromettre la durabilité d’écosystème vitaux »(Partenariat Mondial de l’Eau, 2000).

Selon les promoteurs de la GIRE, l’eau ne manque pas, elle est simplement mal gérée. La GIRE propose un modèle de gestion de l’eau basée sur une unité locale, le bassin versant : « L’unité de gestion de la GIRE est le bassin hydrographique dans lequel les eaux de surface et les eaux souterraines sont inextricablement liées entre elles et avec l’utilisation des sols. L’environnement assure la mise à disposition et la régénération de l’eau. C’est un système dynamique, où les ressources naturelles sont interconnectées et qui présente également des limites auxquelles il faut accorder plus d’attention».

La GIRE intègre aussi la dimension sociale de la gestion de l’eau : « Afin de garantir une utilisation durable des ressources en eau, la GIRE souligne l’importance d’impliquer tous les acteurs concernés au sein d’un même bassin hydrographique : autorités, institutions, secteur privé et public et société civile avec une attention particulière accordée aux femmes et aux groupes minoritaires ». La GIRE affirme que pour ce faire, il est « important de mettre en place un cadre permettant aux populations locales de s’exprimer sur leurs problèmes et besoins, de se responsabiliser face à l’utilisation des ressources qui les entourent (…) ». Au Québec, de nombreuses organisations de bassin versant mettent en place une forme de GIRE dans leur communauté locale. La GIRE est beaucoup plus difficile à réaliser aux niveaux national et international. Dans certaines régions du monde, il est en fait impossible d’agir selon la logique des bassins versants (par exemple au Sahel). La gestion coordonnée de l’eau doit plutôt s’efforcer d’intégrer l’incertitude climatique. Les solutions « douces » consistent à collecter des données pour comprendre les nouveaux rythmes des précipitations et améliorer les systèmes d’avertissement en cas d’inondation ou de sècheresse, alors que les solutions plus « dures » prévoient la construction ou le recyclage de barrages et de réservoirs afin de stocker de l’eau en cas de sècheresse – ce qui peut engendrer d’autres impacts environnementaux négatifs… Toutefois, comme le recommande une étude sur la question de l’eau en Inde, il est essentiel de conserver et promouvoir la dimension communautaire de ces différentes solutions, c’est-à-dire d’impliquer dans la gestion des barrages et réservoirs des membres de la communauté où ils se trouvent, et pas simplement en envoyant deux ou trois représentants au comité de gestion des barrages.

Le recyclage et l'utilisation optimale de l'eau

Le recyclage de l’eau est une pratique qui pourrait ralentir la pénurie et améliorer l’accès à la ressource en eau. Le Centre national de la recherche scientifique décrit une technique de recyclage de l’eau domestique dans des immeubles, développée au Japon: les eaux de lavage sont récoltées dans des citernes, traitées grossièrement sur place et renvoyées dans l’immeuble pour alimenter les chasses d’eau ». La consommation est alors réduite de moitié. Les bâtiments homologués LEED, toujours plus nombreux, recyclent leurs eaux grises.

Dans de nombreux pays du sud, l’eau de pluie est recueillie dans des citernes sur le toit des maisons ou des hôpitaux afin de servir d’eau de lavage ou d’irrigation. Ces dispositifs doivent être améliorés pour minimiser la contamination de cette eau et multipliés dans les régions du monde où la saison sèche est très longue. Ils peuvent aussi être utilisés dans les pays du nord, à des fins de jardinage ou de remplissage des piscines, par exemple.

L’étude sur la question de l’eau en Inde recommande aussi l’adoption de l’agriculture biologique qui améliore la capacité de rétention d’humidité des sols, comme c’est le cas pour le système de culture intensive du riz (SRI) qui minimise les besoins en eau tout en augmentant la récolte.

Dessalement de l'eau

Dessaler l’eau de mer est une solution souvent évoquée pour contrer la possible pénurie d’eau potable à venir.

Ce procédé consiste à extraire de l’eau douce à partir d’une eau saumâtre ou salée, comme de l’eau de mer, selon une procédure de distillation. La distillation consiste à évaporer l’eau de mer en utilisant la chaleur des rayons solaires ou en la chauffant dans une chaudière. Seules les molécules d’eau s’échappent, laissant en dépôt les sels dissous et toutes les autres substances contenues dans l’eau de mer. Il suffit alors de condenser la vapeur d’eau ainsi obtenue pour obtenir une eau douce consommable.

Cette technique est encore très coûteuse, et n’est donc pas accessible de manière égale dans tous les pays. De plus, cette solution comporte certains risques environnementaux, comme le rejet des saumures doublement concentrées en salinité naturelle dans la mer, ou le rejet d’eaux chaudes en mer résultant du procédé de distillation, ou encore la fuite de métaux, sous forme de traces ou de produits nettoyants s’échappant des installations de traitement.

Les défis des prochaines années au Québec

De nombreux organismes œuvrent à un partage plus équitable et à une gestion plus responsable des ressources en eau. C’est notamment le cas de la Coalition québécoise pour une gestion de l’eau - Eau Secours! Cette coalition a pour mission « de revendiquer et promouvoir une gestion responsable de l’eau dans une perspective de santé publique, d’équité, d’accessibilité, de défense collective des droits de la population, d’amélioration des compétences citoyennes des citoyens, de développement durable et de souveraineté collective sur cette ressource vitale et stratégique ». Comme plusieurs autres, Eau Secours propose de considérer l’eau comme un bien commun plutôt qu’une marchandise.

Depuis 1997, la coalition - Eau Secours! a mené plusieurs combats qui ont contribué à la gestion responsable des eaux au Québec, notamment en stoppant la privatisation des infrastructures de l’eau à Montréal, en empêchant des multinationales de s’emparer des eaux souterraines de certaines municipalités au Québec et en protégeant plusieurs chutes considérées comme faisant partie du patrimoine naturel québécois. C’est en s’alliant avec les municipalités et la société civile que l’organisme a réussi à relever ces défis de taille.

La gestion des ressources en eau reste un défi de taille pour les prochaines années au Québec et au Canada. La présidente de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, Eau Secours!, Martine Chatelain, cite en exemple l’exploitation des gaz de schiste par fracturation hydraulique (100 000 litres d'eau par fracturation, une dizaine de fracturation par puits, des milliers de puits prévus au Québec) et le manque d'encadrement législatif au Québec pour protéger la ressource.

« On ne connait pas nos ressources en eau, on fait peu de recherche, on n'a pas assez d'inspecteurs pour surveiller et la loi n'est pas opérationnelle. Par exemple, le Québec a perdu en cour contre une compagnie de production de canneberges (qui détruisait un milieu humide parce que la loi n'était pas claire) car 55% des articles de la loi n'ont pas encore été votés », explique Mme Chatelain.

Elle ajoute : « Nous prenons le risque de perdre le contrôle collectif des services d'eau municipaux si l’AÉCG (Accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union Européenne) entre le Canada et l'Union européenne est signé et que l'eau soit soumise aux accords de commerces internationaux comme n'importe quelle marchandise. »

« Le rapport canadien sur les ressources en eau disponible au sud du Canada parle d'une perte de 3% de l'eau disponible depuis les 10 dernières années; les causes sont attribuées aux changements climatiques et aux pression accrues sur la ressource », conclut la présidente.


Bibliographie

Petrella, Ricardo. Le manifeste de l’eau – Pour un contrat mondial. Éditions Labor. Bruxelles. 1998. 150 pages.

Référence web

Coalition Eau Secours http://eausecours.org/

Agriculture et environnement. Sécurité de l’eau et changements climatiques : Faits et chiffres. Lucinda Mileham. 15 septembre 2012. http://www.scidev.net/fr/agriculture-and-environment/features/s-curit-de-l-eau-et-changements-climatiques-faits-et-chiffres.html

United Nations Environment Programme – Les politiques et les institutions de gestion de l’eau. http://www.unep.org/geo/geo3/french/274.htm

L’eau en Inde : des recommandations http://www.thehindu.com/todays-paper/tp-national/article3454170.ece

Geo.fr. Les enjeux de l’eau. 16 mars 2009 http://www.geo.fr/dossier-geo/dossier-special-les-enjeux-de-l-eau-33305

Le 6eme forum mondial de l’eau. http://www.eau-vive.org/plaidoyer/le-6eme-forum-mondial-de-leau/271.html

Eau et changement climatique http://web.worldbank.org/WBSITE/EXTERNAL/ACCUEILEXTN/NEWSFRENCH/0,,contentMDK:21877362~pagePK:64257043~piPK:437376~theSitePK:1074931,00.html

Integrating water with climate change adaptation plans http://www.scidev.net/fr/agriculture-and-environment/water/policy-briefs/int-grer-la-question-de-l-eau-dans-les-programmes-d-adaptation-aux-changements-c.html

Sécurité de l'eau et changements climatiques : Faits et chiffres, par Lucinda Mileham, 15 septembre 2010 http://www.scidev.net/fr/agriculture-and-environment/features/s-curit-de-l-eau-et-changements-climatiques-faits-et-chiffres.html

Encyclopédie de l’Agora. Le Contrat Mondial de l’Eau. Riccardo Petrella. http://agora.qc.ca/Documents/Leau_dans_le_monde--Le_Contrat_Mondial_de_lEau_par_Ricardo_Petrella

Journée mondiale de l’eau http://www.unwater.org/worldwaterday/index_fr.html

Agence France-Presse. Sept milliards aujourd’hui, peut-être quinze milliards en 2100. Le Devoir. Jeudi 27 octobre 2012.

Julien, Frédéric. Le mythe des guerres de l’eau. Section idées du Devoir. Lundi 23 mars 2009.

Centre national de la recherche scientifique http://www.cnrs.fr/cw/dossiers/doseau/decouv/preservation/02_recycler.htm

Spécialistes

Martine Chatelain, présidente de la Coalition québécoise pour une gestion responsable de l'eau, Eau Secours! webmaster@eausecours.org

Riccardo Petrella http://www.riccardopetrella.eu/ Riccardo Petrella est un politologue et économiste italien, enseignant à l'Université catholique de Louvain (Belgique). Il a notamment fondé en 1991 le groupe de Lisbonne, composé de vingt et un membres universitaires, dirigeants d'entreprises, journalistes et responsables culturels, pour promouvoir des analyses critiques des formes actuelles de la mondialisation. riccardo@ierpe.eu

Louise Vandelac, sociologue, directrice de l’Institut des sciences de l’environnement de l’UQAM, vandelac.louise@uqam.ca (514) 987-3000 poste: 4307

Lucie Sauvé, professeure titulaire au département de didactique de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Elle est également directrice du Centre de recherche en éducation relative à l’environnement et à l’écocitoyenneté, membre de l’Institut des sciences de l’environnement et de l’ Institut Santé et Société de l’UQAM. Elle est chercheure associée au réseau Dialog sur les questions autochtones. Elle dirige la revue internationale Éducation relative à l’environnement – Regards, Recherches, Réflexions et le comité scientifique du Réseau international francophone de recherche en éducation relative à l’environnement (RefERE). sauve.lucie@uqam.ca Téléphone: (514) 987-699

MOT-CLÉ : EAU, ENVIRONNEMENT, ÉCONOMIE, SÉCURITÉ, ACCESSIBILITÉ